Scénario : José-Louis Bocquet et Jean-Luc Fromental
Dessin : Antoine Aubin
Montagnes de l'Oural, Kazakhstan, 1963. Olga Mandelstam y travaille comme archéologue. Elle est sur la piste d'une colonie légendaire. Olga prétend avoir découvert des vestiges de la cité d'Arkaim. Une ville slave dont on pense qu'elle a vu le jour dès 1800 avant Jésus-Christ. Cela voudrait dire qu'Arkain est plus ancienne que la célèbre pyramide de Khéops. Le professeur Mortimer est invité par Olga à visiter le site. Mortimer, en tant qu'archéologue amateur, est enthousiaste. Arrivés en Union soviétique, Olga et Mortimer ne découvrent pas de squelettes anciens. Au contraire. Sept cadavres, récemment enterrés, remontent à la surface. Ils présentent tous la même mutilation : la peau de leur visage a été enlevée chirurgicalement et ils ont également deux petits trous dans l'occiput. Cela rappelle à Mortimer les méthodes d'un certain Julius Kranz. Kranz est un neurochirurgien allemand qui a préconisé des procédures électrochirurgicales pour les patients atteints de schizophrénie. Il semble donc que quelqu'un ait joué avec leurs cerveaux. Le capitaine Blake se trouve au même moment à Berlin-Est pour tenter de comprendre pourquoi un infiltré y a été assassiné. Ses derniers mots causent des maux de tête aux services secrets de Grande-Bretagne, de France, d'Allemagne et des États-Unis. Le président américain John Fitzgerald Kennedy s'apprête à passer huit heures à Berlin où il prononcera son célèbre discours près du fameux mur. Mais ce que l'histoire nous a transmis n'est pas ce qui s'est réellement passé : Francis Blake, envoyé là-bas pour protéger le "Prince" (c'est-à-dire le président), va découvrir un incroyable complot. Blake et Mortimer se remettront bientôt ensemble de toute façon, car il s'avère que Kranz a aussi une clinique à Berlin-Est pour ses expériences cérébrales macabres. Ce n'est que dans les dernières pages que nous découvrons les véritables intentions de leurs adversaires ...
La guerre froide et les poursuites. Tout ça a un côté James Bond-esque. Nous avons apprécié la lecture de cet album qui est sans aucun doute l'un des meilleurs albums publiés dans l'ère post-Jacob. Les scénaristes José Louis Bocquet (Kiki de Montparnasse) et Jean-Luc Fromental (Le Coup de Prague) ont déjà écrit le prochain album de la série extérieure de 120 pages, qui sera dessiné par Floc'h et publié en 2023. D'un point de vue de l'histoire, Huit heures à Berlin se déroulent après les événéments de l'Onde Septimus. Les séquences relatives à Blake sont passionnantes et bien réalisées, avec une grande profusion de documentation (comme c'est dans la nature de la saga), des scènes très animées et des solutions pertinentes comme l'éditeur cubain qui aide Blake. La partie concernant Mortimer est assez surprenante quand on voit son " mauvais côté " se matérialiser, rendu graphiquement dans un style cartoon puis avec une régression animaliste. Nous avons également été frappé par le fait qu'une course étrange avec le temps est prise à la page 37. Mortimer parvient à se déshabiller pendant une course-poursuite, à déshabiller un cadavre avec ses vêtements, à emporter le cadavre par une fenêtre ouverte et à revenir se coucher lui-même dans le cercueil. Mortimer semble être capable d'arrêter le temps pendant un moment. Les deux scénaristes se livrent à des citations massives, Alfred Hitchcock fait une apparition, et nous assistons au tournage du film Ztracena tvar (Visage perdu), ainsi qu'à beaucoup d'autres détails auto-référentiels. En soi, le "traitement" subi par Mortimer semble tout droit sorti du film "Orange Mécanique". Il faut reconnaître à Bocquet et Fromental le mérite d'avoir utilisé de manière très astucieuse le bon vieux Olrik, qui ne se contente pas de signifier sa présence (comme en d'autres occasions) mais conditionne lourdement, et de manière cohérente avec le personnage, le développement des événements. Le dessinateur Antoine Aubin a déjà produit deux albums de Blake et Mortimer en 2010 et 2013. Plus que jamais, il rend un bel hommage au style de Jacobs. La ligne pure et simple avec des dessins très détaillés et soignés lui convient très bien. La façon dont il dessine les bâtiments historiques et les voitures est brillante. Check Point Charlie, la célèbre Zimmerstrasse, Rathaus Schöneberg... Aubin dépeint tout cela très intelligemment. Il a également réussi à rendre les figures féminines avec beaucoup de talent. Alors y a-t-il quelques écueils ? La couverture apparaît très statique, pas immédiatement invitante. Mais il y a suffisamment de fans qui achètent chaque nouvel album de Blake et Mortimer de toute façon. L'année prochaine, trois Blake et Mortimer sortiront, le volume spécial mentionné plus haut, la suite du Rayon U de Van Hamme et Cailleaux, puis le nouveau Sente et Juillard (le dernier pour Juillard).
VERDICT
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Un épisode post-Jacobs de Blake et Mortimer très réussi. Le duo restera une marque solide tant que les équipes différentes qui travaillent sur la série sauront se renouveler. L'intrigue construite avec pertinence peut s'appuyer sur un dessin d'une grande précision et de nombreux clins d'œil à la pop culture en général.